Dans une récente décision; les juges de Bonneville ont condamné Malcolm Erskine de British Ski Academy (BSA) à payer une amende de 3 000€ pour avoir employé des entraineurs de ski « non qualifiés » dans les Alpes.
Le procureur de la République avait requis une amende de 1.500€ avec sursis lors de l’audience, mais les juges sont allés bien au-delà, en condamnant M. Erskine à une amende ferme de 3.000€. M. Erskine a immédiatement fait appel de cette décision.
C’est la Direction Départementale de la Cohésion Sociale (DDCS) de la Haute-Savoie en charge de cette affaire qui avait procédé à des contrôles sur les pistes des Houches, puis saisi le procureur pour qu’il poursuive BSA pour absence de déclaration (libre prestation de service ou libre établissement) et emploi d’entraineurs non qualifiés.
La DDCS avait cependant indiqué au procureur que sans déclaration, il lui était impossible de vérifier l’état des qualifications des entraineurs de BSA. Cette incohérence n’a pourtant pas empêché les juges d’estimer que les entraineurs de BSA n’étaient pas suffisamment qualifiés pour enseigner la pratique du ski à de jeunes britanniques.
Quoi qu’il en soit, la décision du tribunal de Bonneville est d’une importance capitale en ce qu’elle implique l’obligation pour n’importe quel entraineur sportif ayant l’intention de venir entrainer son équipe en France, de se déclarer et de prouver son niveau de qualification à l’administration française pour se conformer aux normes nationales.
Ceci soulève tout un ensemble de questions nouvelles, car si les entraineurs de M. Erskine doivent se déclarer et prouver leur niveau de qualification pour pouvoir entraîner les membres de leur propre équipe / club, tous les entraineurs souhaitant entrainer / encadrer leurs équipes / athlètes en France doivent désormais se déclarer et détenir la qualification adéquate.
Cette décision indique très clairement que désormais, les juges français sont prêts à condamner à des amendes pécuniaires – demain à de la prison ferme ? - les entraineurs non déclarés et qui ne disposeraient pas de la qualification conforme aux critères français. La motivation de ces condamnations est celle de la sécurité, l’Etat français considérant que la sécurité des pratiquants repose exclusivement sur la qualification du personnel encadrant.
Cette situation est d’autant plus contraignante que la législation française ne prévoit aucune période minimum pour se conformer aux obligations mentionnées plus haut : tout entraineur / coach sportif rémunéré par son club/ fédération qui prévoit de venir en France pour entrainer / superviser son équipe nationale, régionale ou locale ou pour participer à une compétition ne serait-ce que d’une seule journée, pour un entrainement d’une semaine ou pour une période de plusieurs mois, devra désormais se déclarer auprès de la DDCS locale et prouver son niveau de qualification avant même d’arriver en France sous peine de condamnation.
Tous les entraineurs des joueurs de tennis devront donc se déclarer avant Roland Garros; les entraîneurs des équipes présentes à l’Eurofoot de l’UEFA cet été qui ne se seront pas déclarés seront très probablement poursuivis au tribunal ; il en sera de même pour les entraineurs des cyclistes pendant le Tour de France. Ces personnes se seront elles déclarées et seront elles en possession des qualifications requises ? Quelles sont les conséquences pour les prochains évènements sportifs internationaux se déroulant en France ?
Il semblerait que l’administration française, dans son obsession de faire appliquer les articles 212-1, 212-8 et 212-11 du Code du sport, se soit mise dans une situation assez délicate ; ces articles ne sont-ils finalement pas simplement inapplicables ?
Pour autant, les Préfets et personnels du Ministère des sports sont dans l’obligation, sous peine d’enfreindre l’article 40 du Code de la procédure pénale, d’informer le procureur des délits dont ils ont connaissance et le procureur devra engager des poursuites contre les entraineurs non déclarés et irrégulièrement qualifiés.
La décision du tribunal de Bonneville pourrait être qualifiée d’ambitieuse au niveau du contrôle de l’Etat sur les activités sportives, mais aussi simplement d’obsessionnelle.
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